Insert Gédé, ou l’histoire d’un géant battu
28/01/2012A la veille du prix d’Amérique, j’ai choisi comme cheval de légende un trotteur qui m’a fait énormément vibrer en son temps, bien qu’il ne l’ait pas gagné. Et pourtant, il le méritait largement. Insert Gédé, mais pourquoi, en 2003, as-tu penché à droite dans les dernières foulées pour te faire battre d’un nez ?Insert Gédé est né en 1996 en Mayenne. Dans sa généalogie, on retrouve la matrone Ua Uka et donc son père Kerjacques du côté paternel, et le champion et étalon prodigue Fandango du côté maternel. Il appartient à une génération bourrée d’éléments de valeur, tels Ipson de Mormal, Install, Ingen… Elevé par Annick Dreux, son propriétaire est Joël Séché, son entraîneur Jean-Luc Bigeon, et son driver patenté Yves Dreux.Sa première performance date de 1999 : il a 3 ans, et se place 3e du critérium des 3 ans. L’année suivante, en 2000 donc, il est 4e du critérium des 4 ans. C’est là qu’arrive son année de 5 ans, l’année 2001. Une année invraisemblable pour Insert Gédé, même si elle commence doucement, avec une 8e place dans le prix d’Amérique. Il gagne ainsi le prix d’Eté, une course particulièrement dure car ouverte aux hongres. Il échoue ensuite dans le critérium des 5 ans (en terminant tout de même honorablement 5e), mais la suite est incroyable. Coup sur coup, Insert Gédé remporte les quatre préparatoires au prix d’Amérique : le prix de Bretagne 2001, le prix du Bourbonnais 2001, puis enchaîne avec le prix de Bourgogne 2002 et le prix de Belgique 2002. On n’avait pas vu ça en France depuis Ourasi !Insert Gédé se présente donc au départ du prix d’Amérique 2002 avec des ambitions. Mais il doit faire face au tenant de l’épreuve, le champion italien Varenne. Sans parler de Général du Pommeau, qui a encore de beaux restes. Insert Gédé ne peut rien face à ces deux vedettes, il termine 3e. Dans la foulée, il prend la 5e place du prix de France, puis la 2e du prix de Paris.
Successeur désigné de Varenne, mais pas intronisé
L’automne 2002 arrive, et Insert Gédé termine 2e du prix de Bretagne. Arrive janvier 2003. Insert Gédé a 7 ans, il est juste à parfaite maturité. Il le confirme d’ailleurs en remportant le prix de Bourgogne. Le prix de Belgique, où cette fois il doit rendre 25 mètres, n’est pour lui qu’un échauffement, l’objectif est ailleurs. Le dernier dimanche de janvier 2003, le prix d’Amérique se cherche un successeur à Varenne, désormais retiré au haras. Général du Pommeau, cette fois, n’a plus la même accélération qu’avant, Fan Idole non plus, et l’ambitieux Gigant Néo est encore (très) jeune : en toute logique, ce prix d’Amérique doit revenir à Insert Gédé, d’ailleurs favori à la cote. La course se déroule dans des conditions dantesques, il pleut, les roues des sulkys soulèvent et projettent le mâchefer de la piste aux visages des concurrents, trotteurs comme drivers. Est-ce une de ces projections qui a gêné Insert Gédé dans son effort final ? Je crois qu’on ne le saura jamais. Toujours est-il que dans la dernière ligne droite, le champion ne court pas tout droit, mais en diagonale, comme s’il visait la lice extérieure. De fait, il parcourt plus de terrain que les autres, et finit par se faire battre de rien du tout (le commentateur télé le donne même vainqueur dans un premier temps, le lien de la vidéo figure en fin d’article) par un outsider allemand, Abano As, conduit par Jos Verbeeck. Fatalitas !Cette même année 2003, Insert Gédé gagnera ensuite le prix de Paris puis, à Enghien, le prix de l’Atlantique. Mais, en proie à des soucis de santé, il n’aura plus jamais l’opportunité de se présenter au départ du prix d’Amérique. Sa chance est passée en janvier 2003. Et je vous le dis franchement, j’en suis encore triste aujourd’hui. Oh, bien sûr, je surveille ses rejetons. Pas de super crack pour l’instant, mais plusieurs excellents trotteurs : si vous pensez à regarder les parents des partants d’aujourd’hui et que vous voyez apparaître le nom d’Insert Gédé, prenez en considération le concurrent en question, il mérite un papier attentif. Insert Gédé se montre un très bon étalon. Il manque juste « le » fils prodigue, peut-être viendra-t-il ?